À l'occasion de son anniversaire: Municipalité de Sfax, philosophie de la moto bleu
Déjà, 135 ans sont écoulés, envolés, enfuis…
Il n’est pas inintéressant de s’offrir un entre-temps pour faire la fête… Fêter, c’est une pause par rapport à une dynamique. Une rupture par rapport à un chemin. Un recul par rapport à un mouvement. Un désordre par rapport à un ordre, ou a contrario un ordre par rapport à un désordre. Un oubli par rapport à la condition humaine ordinaire, classique, rituelle…
135ème anniversaire, cette fabuleuse fête citadine est un abandon. Un rêve. Un mouvement d’évasion.
Quand la fête devient un fait social, toutes les lectures philosophiques deviennent non valides. Ça devient alors une réalité quant à un acte collectif d’éternisassions et de mémorisation… Cet acte devient une historicité, pure et dure. Toute opportunité à saisir entre l’Homme et son créateur, le Bon Dieu, entre l’Homme et l’Homme, et entre l’Homme et son espace, son Histoire, ses symboliques,…
La fête est un assemblage autour d’un événement dans un moment défini. Un apprentissage et un vécu. Une reconnissance et un compte à rendre. Des remerciements.
Pascal et Freud s’occupaient, tous les deux, de la fête. D'autres philososphes aussi. Fêter est le fait de lever la censure, selon Freud… C’est un excès autorisé !...
L’animation est ainsi intéressante pour la société. Faire la fête, c’est dynamiser le social, le culturel, l’économique, le commercial, le comportemental, le citoyen, le citadin,… C’est mettre fin à la misère, à l’oisiveté, à la passivité, à la démission des citoyens de la chose publique, collective et citadine… C’est changer le rituel et les habitudes… C’est des bonnes pratiques…
2. Sfax des "motos bleues":
Faire la fête à la ville, dans la ville, par la ville et pour la ville, à l’occasion de son anniversaire, c’est se permettre et permettre aux gens, Sfaxiens surtout, de s’auto-évaluer et d’évaluer un certain parcours.
135 ans d’existence pour une institution municipale de telle envergure, c’est ainsi philosopher. Où en est par rapport aux autres?
Et, quelle marge de manoeuvre possédons-nous quant à un Centre fort centralisateur?...
Bref, Jürgen Habermas est de retour !...
Il nous a enseigné le "patriotisme constitutionnel". Notre septième chapitre de la Constitution tunisienne du janvier 2014, relatif à l’autorité locale, mérite une lecture approfondie par rapport à une conception presque révolutionnaire de bien conduire le développement depuis l’inertie du pays, à l’interne… C’est aux racines des villes (culture, traditions, patrimoine, capacités et compétences,…) que se construisent les développements local et régional et se pratique une réelle démocratie locale.
Primo, le "patriotisme constitutionnel" d’Habermas n’est autre qu’un concept fondamental politique fort lié à l’identité, cette fois-ci citadine, et à la citoyenneté. Faire la fête pour la ville, c’est aussi permettre un dialogue social, au sens d’Habermas encore.
Secundo, il y a le principe de publicité qui englobe, par définition, l’information, la communication et l’image de la cité avec ses citoyens. Ce n’est autre que le marketing territorial. Tel chantier, postrévolutionnaire évidemment, offre toute une démarche de discussion collective, basée sur la légitimation d’un (des) argument(s). L’espace public présente une pratique de démocratie délibérative où la publicité garantit un "pouvoir d’assiègement permanent".
Tertio, il existe un certain "agir communicationnel". Ce Habermas défend l’éthique de la discussion. La fête favorise toute occasion de communication, de discussion, de partage d’idées, de va-et-vient "non stop" intra-ville et, pourquoi pas, inter-villes !...
Il s’agit d’une double vision. Une première est relative au(x) système(s) de fonctionnement d’une ville (une vision systémique). Une seconde concerne l’individu, soit-il le citoyen, ou plus précisément, le citadin (une vision individualiste).
La fête conjugue cette relation extraordinaire entre l’Homme et la société dans les domaines objectif, social et subjectif. Toute l’équation réside alors au niveau de la résolution de la compréhension du réel mutuellement…
Alors, les "motos bleues" traduisent toute une culture de vivre la ville, de communiquer, d’économiser, de penser, de bâtir, de commercialiser, de socialiser, de fêter l’Aïd, de supporter le "CSS" et de payer l’impôt pour soi-même et pour les autres…
Sfax, bon anniversaire.
Hichem Elloumi
Ex-Secrétaire général de la Municipalité de Sfax.